Munich – du 12 au 14 octobre 2023

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La Seconde Guerre mondiale à Munich – entre histoire et mémoire
Après avoir passé quelque temps à Versailles et à Paris où nous avons parlé de la Première Guerre mondiale et visité des lieux historiques, nous avons pris la direction de Munich et de la Seconde Guerre mondiale, afin de poursuivre notre voyage à travers l’Europe et l’histoire. Nous y sommes arrivés le quatrième jour de notre itinéraire en vue de comprendre la place particulière qu’occupe Munich dans le récit de la Seconde Guerre mondiale.
Immédiatement après la Première Guerre mondiale, cette ville a connu les prémices de la vague de fascisme qui allait embraser l’Europe. C’est là qu’est né le « Parti des travailleurs allemands » (Deutsche Arbeiterpartei, ou DAP), auquel Adolf Hitler a adhéré et dont il a pris le contrôle. Il devient bientôt le « Parti national-socialiste des travailleurs allemands » (Nationalsozialistische Deutsche Arbeiterpartei, ou NSDAP). En 1923, fort du succès de son parti auprès des plus riches et des hauts gradés, Hitler tente un putsch, afin de prendre le pouvoir dans la capitale bavaroise et, à terme, marcher sur Berlin et y renverser le gouvernement. Cette tentative ratée n’entrave pas son ascension, bien au contraire. Après avoir purgé seulement un tiers de sa peine de prison, période qu’il a mise à profit pour théoriser et structurer son idéologie dans « Mein Kampf », il est revenu plus puissant, plus influent et avec davantage d’appuis à Munich et dans le reste de la Bavière. Munich a été le centre névralgique de l’accès d’Hitler au pouvoir, aux médias et à l’argent.
C’est une histoire que la ville a eu du mal à reconnaître. C’est pourquoi il était si essentiel, dans le cadre de notre voyage, de parcourir Munich et son passé, de comprendre ce qui s’y est produit et pourquoi, et d’en apprendre davantage sur le poids de l’histoire, l’importance des lieux de mémoire et la manière d’informer les nouvelles générations.

Le groupe de jeunes réalise une chronologie collective de la Seconde Guerre mondiale.

Photo de l’exposition au Munich Documentation Center for the History of National Socialism
Apprendre l’histoire
Celui-ci a représenté une étape importante pour les participantes et participants français, allemands et bosniens ainsi qu’au regard de leurs connaissances sur cette partie de l’histoire allemande. Après quelques heures passées dans le centre à parcourir les expositions, les témoignages, les photographies, les lettres personnelles, les documents officiels, les affiches de propagande et les journaux de l’époque, les jeunes se sont réunis pour donner leurs impressions. Le groupe a été surpris de découvrir le rôle que la ville de Munich a joué pendant la Seconde Guerre mondiale, émus par les témoignages, intéressés par la résistance allemande et ses acteurs ; il a découvert la place que le national-socialisme attribuait aux femmes dans la société et il a apprécié la diversité des informations et de leurs sources. Cette séance de restitution a également été l’occasion de partager leurs émotions.
Expériences sociales et interculturelles
La deuxième partie de notre séjour à Munich a consisté à rencontrer la troupe de théâtre « Time Busters », du Theaterlabor Neuperlach. Alors que nous avions abordé l’histoire en France et au Centre munichois de documentation à travers des archives, des livres et des monuments, la rencontre avec les Time Busters nous a permis d’entrer en contact avec l’histoire sur un plan émotionnel. Le Theaterlabor Neuperlach est une branche du Münchner Kammerspiele, un lieu situé à l’extérieur du centre-ville et consacré à la création, à l’expérimentation et à la mise en relation d’artistes, d’habitantes et habitants du quartier et de jeunes par le biais des arts du spectacle. Grâce au soutien de la Fondation EVZ, Time Busters, un groupe d’adolescentes et adolescents, a créé une pièce de théâtre basée sur des histoires tirées du passé, caractérisées par des guerres et des familles en fuite pour survivre, repartant à zéro dans un nouveau pays. Tous les jeunes avaient des histoires familiales de différents pays que les différentes générations avaient quittés pour différentes raisons. La pièce s’inspire de récits personnels, rapportés par des membres de leurs familles.
L’idée était de rencontrer et d’échanger avec les jeunes à l’origine de la pièce, ainsi qu’avec les deux personnes qui les ont soutenus. L’objectif était également de rentrer dans l’histoire avec eux, de se rapprocher, de comprendre à quel point il était important pour eux de parler de l’expérience de leurs parents ou grands-parents, et de l’impact de la guerre sur eux – une génération vivant dans un pays en paix depuis près de 80 ans.
Pour conclure le programme de la journée, le groupe est allé voir la pièce « Ха́та » de Kamilė Gudmonaitė, « un numéro d’équilibriste musical et de danse avec des Ukrainiennes et Ukrainiens (partie I) et des Russes (partie II) de Munich ». Il réunit des Ukrainiennes et Ukrainiens ainsi que des Russes sur scène et à l’écran, à différents moments, mêlant des témoignages de personnes ayant vécu la guerre actuelle à des danses, des chorégraphies et des chansons. Ce fut un moment très fort et une plongée dans la vie et les difficultés des personnes qui vivent une guerre réelle tout près de chez elles. À la fin de la pièce, les participantes et participants étaient bouleversés, hésitant entre le silence pour assimiler toutes les informations et les émotions de la journée, et la volonté d’analyser et d’exprimer leurs ressentis.

Des découvertes culturelles à part
Enfin, Munich a également été l’occasion de rapprocher les membres de notre groupe itinérant entre eux. C’était l’occasion d’explorer ensemble, de visiter et de découvrir les rues de la ville, et de s’entraider, en particulier celles et ceux qui ne parlaient pas la langue locale. C’était le moment idéal pour expliquer des faits amusants de la culture allemande, prendre un café (ou faire la fête) et poser des questions permettant de mieux se comprendre et de comprendre d’autres points de vue. Le fait que les jeunes aient dû s’organiser pour manger un morceau, prendre les transports en commun et être à l’heure au rendez-vous avec l’équipe a créé de nombreuses opportunités de nouer des liens et d’interagir.
Le « temps informel », c’est-à-dire le temps où rien n’est prévu dans le programme, est essentiel pour les échanges de jeunes tels que celui-ci. Il donne aux personnes la liberté de se rencontrer à un autre niveau, par le biais d’affinités, d’intérêts communs et/ou de besoins similaires. Elles se sentent libres de faire ce qu’elles veulent, de proposer ce qu’elles savent pouvoir intéresser les autres et de prendre des initiatives. Il n’existe aucune pression pour traîner ensemble, ce qui leur permet à la fois d’avoir du temps pour elles et de se retrouver, idéalement en mélangeant les groupes linguistiques.
Après deux journées très riches à Munich, nous avons pris la direction d’un autre acteur de la Seconde Guerre mondiale – l’Autriche – pour en apprendre davantage sur sa perspective historique et découvrir ses lieux de mémoire. Nous sommes ensuite partis vers l’Est, nous rapprochant de notre destination finale, Sarajevo.
Autrice : Morgane Quatremarre Bonnel